J’ai fini par le remarquer, le jeune Taïwanais qui semblait me fixer de son objectif, insistant. Autour de nous, des adolescents s’amusaient à se courir après, en un décalage avec le lieu qui me laissait indifférente, intime avec mes pensées sombres.
Et toujours ce jeune homme, dont les yeux curieux apparaissaient maintenant au-dessus de son appareil photo, c’était bien moi qu’il regardait. Attendait-t-il en fait que je sorte de son champ de vision afin de prendre une allée vide ? À deux mètres de lui, j’ai fait exprès de bifurquer pour « disparaître ». Et il est revenu me cueillir, en train de prendre une photo des murs, l’air grave et interrogateur.
Lorsqu’il m’a expliqué, ce garçon a aussitôt mis un sourire sur mon visage et illuminé ma journée. Et le soleil, soudain m’est apparu. Sa veste en avait d’ailleurs la lumière, sa gentillesse aussi. Alors j’ai voulu le prendre à mon tour, proposer ma vision de cet instant et de cet échange. Deux étrangers se croisant au hasard d’un labyrinthe et d’une mémoire, capturant des images à la volée, des images volées, immortalisant dans un hommage aux morts un bref instant de vie, avant de s’envoler…